Ce matin, le Rapport de l’automne 2013 du vérificateur général du Canada a été déposé au Parlement.

Le gouvernement actuel devrait être préoccupé par le fait que les progrès réalisés par cinq des sept ministères audités ainsi que par le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada sont jugés « insatisfaisants » et qu’il existe des « lacunes et faiblesses » dans les contrôles internes en matière de rapports financiers. Après tout, les contrôles internes visent à sauvegarder les ressources publiques et à lutter contre la perte, le gaspillage, la mauvaise gestion, les erreurs et la fraude.

Les rapports financiers constituent l’attribut le plus important d’un régime de responsabilité fiable. Comme l’a déclaré le président de l’ACAF, Milt Isaacs au Ottawa Citizen, « si les ministères ne peuvent pas respecter les normes et exigences normales, ils risquent de sous-utiliser ou surutiliser des fonds ou d’en faire mauvais usage. Ceci a une incidence sur l’établissement des coûts, le suivi des dépenses et la prise de décision, des éléments qui sont tous menacés s’ils s’appuient sur une information financière qui n’est pas aussi complète qu’elle devrait l’être. »

Malgré que le rapport du vérificateur général du Canada s’avère inquiétant, les conclusions ne sont pas surprenantes. Depuis 30 ans, on voit une augmentation en matière d’exigences financières, particulièrement depuis 2006 avec l’adoption de la Loi fédérale sur la responsabilité. Les ministères sont débordés et répondent difficilement aux exigences grandissantes en matière de rapports externes. Dans un rapport préliminaire rédigé en juin 2012, le Conseil des adjoints aux dirigeants principaux des finances (ADPF) constate que les ministères sont incapables de satisfaire aux exigences en matière de rapports ou de remplir leurs fonctions de contrôleurs.

Donner à entendre, comme certains le font, que la solution serait de réduire les exigences en matière de rapports n’est, de fait, qu’un constat d’échec, qui entraîne ses propres conséquences possibles. Si nous perdons davantage notre capacité de satisfaire aux exigences en matière de rapports — ou si nous décidons d’alléger ces exigences –, nous risquons de compromettre notre réputation.

Cela peut avoir des conséquences non désirées pour les Canadiens et les Canadiennes. Cela peut avoir des incidences sur la cote de nos obligations et affaiblir notre position dans la négociation d’accords commerciaux, entre autres risques. Cela peut aussi se traduire par des occasions perdues d’accès à de nouveaux marchés et emplois. Selon M. Isaacs, « il y a d’importants bénéfices pour les citoyens à l’échelle mondiale que les gouvernements soient aptes à mettre de l’ordre dans leurs finances en respectant les normes comptables généralement reconnues, et je ne peux pas dire que ce soit le cas présentement pour le Canada. »

Comme le Canada élargit son cercle de partenaires commerciaux et explore de nouveaux marchés, ces nouveaux partenaires commerciaux s’attendent à ce que nos finances soient en bon ordre. Nous avons besoin de rapports financiers fiables, exacts et exhaustifs afin d’être un leader international en gestion financière et pour bâtir des relations diplomatiques solides.

Pour remplir les attentes financières, nous avons besoin d’agents financiers qualifiés capables d’interpréter les données financières et de compiler ces rapports. C’est ce qu’on appelle la capacité financière. Adhérer à des normes financières internationales plus rigoureuses ne va qu’augmenter le fardeau sur notre capacité financière. Comme le démontrent le rapport du vérificateur général du Canada et le rapport de ADPF, nous ne sommes pas prêts.

De plus, au fur et à mesure que d’autres pays doivent se plier aux mêmes exigences d’information financière, cela pose le défi de livrer concurrence dans un bassin de talents à la fois restreint et coûteux. La fonction publique fédérale fait face, à l’heure actuelle, au défi de recruter des agents financiers. Cette tâche se complique à cause du régime d’austérité que le gouvernement actuel a décrété sur le plan de la gestion financière et de sa propension à diaboliser la fonction publique.

Nous sommes incapables de recruter les talents dont nous avons besoin pour satisfaire aux exigences en matière de rapports financiers. Le gouvernement doit se pencher sur la façon dont il gère — ou, pour être plus exact, ne gère pas — la communauté FI. La communauté de la gestion financière est dévouée, très motivée et engagée, mais ces qualités faibliront si le climat actuel persiste.

Le gouvernement actuel a fait de la responsabilité financière son cheval de bataille pour se faire élire en 2006. Aujourd’hui le vérificateur général affirme que « les pressions financières auxquelles fait face le gouvernement, conjuguées à son intention déclarée de rétablir l’équilibre budgétaire ou de dégager un excédent, font aussi ressortir la nécessité d’assurer l’intégrité de l’information financière. »

Si ce gouvernement comprend réellement l’importance du rôle que l’intégrité joue dans une économie mondiale, il va devoir investir davantage dans sa capacité financière.

26/11/2013