30 octobre 2008 Le président de l'ACAF discute l'engagement des employés comme étant clef au succès du lieu de travail (ProgressMedia)
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Pour obtenir des employés engagés, il faut ouvrir ses yeux et ses oreilles. Et, rappelez-vous, chacun a un rôle à jouer. Si vous négligez les besoins de vos effectifs, vous pouvez dire adieu à vos bénéfices.
Mary Jane Copps
ProgressMedia.ca
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Vers la fin de l’année dernière, le cabinet de services professionnels Towers Perrin a publié une étude de la population active qui renfermait quelques données renversantes. Seulement 21 % des employés interrogés partout dans le monde font preuve d’engagement à l’égard de leur travail. Et même au sein de ce groupe, 5 % recherchent activement un autre emploi. Pour ce qui est du reste de la population active, où les employés vont de partiellement engagés à désengagés, 25 % sondent le marché du travail.
Bien que le Canada dépasse la moyenne mondiale avec une moyenne de 23 % d’effectifs entièrement engagés, la donnée la plus importante qui ressort est que 68 % des Canadiens envisagent de changer d’emploi. « Tout juste après le tournant du siècle, nous avons commencé à constater une baisse de productivité au travail », déclare Eddie LeMoine, un consultant et facilitateur d’engagement des employés de Halifax. « Nous avons commencé à offrir aux employés plus de compétences et de connaissances afin d’accroître cette productivité, mais avec peu de résultats, voire aucun. »
M. LeMoine déclare qu’il incombe aux employeurs de prendre conscience que les choses ont changé et que l’engagement des employés doit constituer la première priorité de toute entreprise en matière de ressources humaines. « En 1982, personne ne se préoccupait de l’engagement », dit-il. « Lorsque la productivité ralentissait, on pensait qu’on avait une équipe démotivée et qu’il faudrait peut-être procéder à des congédiements et à du recrutement. Mais, aujourd’hui, si vous n’offrez pas à vos employés des occasions de se sentir forts, de les rendre engagés, quelqu’un d’autre le fera. Et vous ne serez peut-être pas en mesure de les remplacer. »
Statistique Canada vient étayer cette affirmation. Le taux de chômage national est à son plus bas niveau des 30 dernières années. Il en va de même au Nouveau-Brunswick. En Nouvelle-Écosse, à l’Île-du-Prince-Édouard et à Terre-Neuve-Labrador, les taux de chômage sont moins d’un point de pourcentage au-dessus de leurs seuils historiques. « Et il ne s’agit pas simplement d’une question de personnes passant à de nouveaux emplois », ajoute M. LeMoine. « J’œuvre auprès d’organisations dont la moyenne d’âge est de 49 ans. Cela peut se révéler une catastrophe — dans six ans d’ici, la majorité de vos employés pourraient prendre leur retraite. »
Qu’entend-on exactement par engagement des employés? Kevin Aselstine, directeur principal du cabinet de Toronto de Towers Perrin, définit cette expression comme étant la volonté des gens de déployer spontanément des efforts pour aider les employeurs à atteindre leurs objectifs d’entreprise. « Nous ne parlons pas ici de bonheur en soi », de dire M. Aselstine. « L’engagement compte plutôt trois caractéristiques ou catalyseurs fort distincts », qu’il résume en trois mots : tête, cœur et main. « Est-ce que je comprends vraiment ce que l’organisation cherche à atteindre? L’organisation est-elle un lieu où je suis fier de travailler? Suis-je disposé à en faire un peu plus et à déployer des efforts spontanés? »
Le cœur même de l’engagement des employés, c’est le changement, et tout commence au sommet. « Il faut d’abord commencer par la direction, car il s’agit de vaincre la culture de complaisance », déclare Milt Isaacs, président et PDG de l’Association canadienne des agents financiers (ACAF) dont le siège social est à Ottawa.
M. Isaacs s’est fait le champion de l’engagement au sein de sa propre organisation et il en récolte joyeusement les fruits aujourd’hui. « J’ai tant de plaisir que je me sens coupable de toucher un chèque de paie », déclare-t-il. « Je pense que, même si je gagnais à la loterie, je resterais en poste. Il est étonnant de constater comme les gens peuvent à la fois passer par les deux extrêmes, l’engagement et la satisfaction. J’arrive au bureau, et il y a tant d’énergie qui s’en dégage. »
Il lui a fallu environ 18 mois pour renverser la vapeur à l’ACAF, mais M. Isaacs estime que l’organisation jouit désormais d’un effectif entièrement engagé. « Nous avions notamment l’habitude de retenir les services d’un avocat pour diriger les négociations collectives, ce qui nous coûtait environ 100 000 $ à chaque ronde de négociations », explique-t-il. « Mais, un de nos agents des relations de travail, qui est avocat, a offert de suivre un cours de 5 000 $ qui, compte tenu de ses antécédents en contentieux, lui permet de se charger des négociations. C’est vraiment ce qu’il voulait — il voulait nous économiser les 100 000 $. »
Lorsqu’il est devenu manifeste que l’ACAF se sentait à l’aise de confier davantage de responsabilités aux personnes au sein de l’organisation, les employés ont commencé à se porter volontaires pour des projets. Il en est résulté des avantages imprévus. « Notre programme pour l’Association a progressé plus rapidement que prévu », déclare M. Isaacs. « Nous avons six mois d’avance sur l’échéancier. Nous avions aussi une nouvelle initiative qui devait durer deux ans, et nous sommes déjà en avance d’environ 18 mois — simplement parce que nous nous en chargeons à l’interne et à 50 % du coût prévu. C’est ce que nous voulons dire par des effectifs engagés. »
M. Isaacs estime que l’engagement, c’est d’abord et avant tout une question d’ « allumer ses employés », de montrer son engagement à leur égard. « C’est quelque chose de gros, un grand changement, pour l’employeur que de manifester son engagement », déclare-t il. « C’est la situation que nous devions renverser. » Dans le cas de M. Isaacs, il fallait d’abord attirer l’attention des employés, ce qui, pour reprendre ses mots, s’est fait au moyen d’un « violent craquement dans la forêt organisationnelle. Il est important de prendre conscience que la rémunération n’est pas un facteur d’engagement, mais qu’elle peut devenir un facteur de désengagement. Si vous pensez qu’en payant davantage vos employés, ils deviendront par le fait même engagés, vous vous leurrez. C’est en restructurant la rémunération que nous avons capté l’attention de tout le monde. »
L’étape suivante consistait à organiser une retraite du personnel, facilitée par M. LeMoine. « Ce fut vraiment le point tournant », ajoute M. Isaacs. « Nous avons demandé à nos employés ce qu’ils attendaient de l’organisation. Nous leur avons dit que nous voulions parler de ce que, selon eux, l’organisation devrait faire pour eux. Ils sont restés surpris, mais nous voulions leur faire comprendre que l’organisation qui les emploie a l’obligation de répondre à certaines attentes de ses employés. »
La facilitation est aussi la première étape que recommande M. Aselstine. « Connaître ses employés, voilà le véritable point de départ », déclare-t-il. « Faites venir quelqu’un qui peut mener un sondage au sein de votre organisation afin de cerner les catalyseurs de l’engagement et quel est votre rendement à leur égard. »
M. LeMoine diffère légèrement d’opinion au sujet du processus d’engagement. « C’est très bien de mesurer, et un sondage ne constitue pas un vilain point de départ. Mais, à vrai dire, la plupart des employeurs au Canada ne sont pas entièrement engagés », dit-il. « Ainsi, même si vous possédez une organisation du tonnerre et que votre pourcentage est de 45 %, il n’en reste pas moins que l’engagement reste un problème. Je ne crois pas qu’il soit nécessaire de mesurer votre propre degré d’engagement. Je crois que vous devriez poser par hypothèse que vous avez besoin d’obtenir l’engagement d’un plus grand nombre de vos employés et que vous devez agir en conséquence. Après, vous aurez tout loisir de mesurer l’accroissement de la rentabilité, de la productivité et du maintien des effectifs. »
C’est ce qui se produit au bureau de Halifax du Groupe CGI Inc. « Nous appelons nos employés « membres », souligne Cecil Smith, vice-président principal de la succursale de l’Atlantique. « Ils sont copropriétaires de l’entreprise parce que nous avons un régime d’achat d’actions. Et, en 2008, une de nos priorités d’entreprise a pour titre « Investir dans les membres ». Nous voulons nous assurer d’investir dans nos membres, et cela signifie mettre l’accent sur nos points forts et établir des objectifs en conséquence. »
CGI a effectivement mené un sondage auprès de ses membres, qui a fait ressortir le besoin de plus d’engagement, de participation et d’enthousiasme. « C’est cela, ainsi qu’un certain problème de roulement du personnel, qui nous a fait prendre conscience que nous devions en faire une priorité », ajoute M. Smith. En travaillant de concert avec M. LeMoine, l’entreprise connaît déjà du succès à deux égards : le degré d’enthousiasme évident au travail et un pourcentage plus élevé de maintien des effectifs. « Il ne s’agit pas d’un engagement des ligues majeures », déclare M. Smith, « mais il faut rester centré sur cette priorité d’entreprise. Il faut commencer par les gens qui sont déjà engagés, puis rejoindre ceux qui manquent d’enthousiasme. »
« Toute entreprise compte des employés activement désengagés », de poursuivre M. LeMoine. « Le pourcentage varie probablement entre 10 % et 20 %. Ce sont ceux qui rechignent, qui distraient les autres de leur travail, qui ont toujours hâte de rentrer à la maison. Et la pire façon d’amorcer le processus d’engagement, c’est de mettre l’accent sur ce groupe de personnes. »
Lorsque les entreprises mettent en place des politiques qui ciblent les employés activement désengagés – par exemple, des feuilles de temps et d’autres modes de contrôle -, tout le monde est insulté. Ceux qui sont désengagés ont plus de motifs de rechigner, et les employés engagés commencent à partir. « Le point de départ idéal, et le seul qui fonctionne vraiment, c’est la haute direction », conclut M. LeMoine. « L’engagement doit venir du sommet pour la simple raison que les gens ne quittent pas l’entreprise, ils quittent des patrons. L’engagement ne doit pas rester un vœu pieux – il faut en faire la preuve. »
Pour M. Isaacs, l’engagement des employés incombe directement à la haute direction. Les cadres supérieurs doivent eux-mêmes être engagés et s’intéresser sincèrement aux intérêts et au bien-être de leurs employés, et ils doivent être disposés à remplir les attentes plutôt que de dire « non » par pur réflexe. Leur réaction devrait être : « Peut-être que nous le pouvons. Quelles sont nos options? Quelles options pouvons-nous créer? » Il conclut : « Un cadre engagé, c’est quelqu’un qui ne dit pas non; sinon, les gens partiront et vous vous retrouverez avec des effectifs inexpérimentés. Il ne faut pas dire non, mais plutôt comment. »
Mary Jane Copps est une consultante en communications de Halifax. On peut la joindre à
maryjane@thephonelady.ca.