Le président de l’ACFO-ACAF Dany Richard a récemment fait l’objet de reportages concernant l’entente d’indemnisation pour les dommages causés par Phénix (Vous pouvez écouter l’interview ici).

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Phillipe Marcoux (animateur) : Vendredi dernier, le gouvernement du Canada et les syndicats de la fonction publique annonçaient qu’ils avaient conclu une entente de principe visant à dédommager des fonctionnaires des problèmes causés par le système de paie Phénix. Il y avait alors quatre syndicats qui adhéraient à l’entente. Hier, on apprenait qu’il y en a maintenant 13, mais il y a plusieurs syndicats de la fonction publique et le plus important de ceux-là, l’Alliance de la fonction publique du Canada, le plus important en termes de nombre de membres, continue de rejeter cette offre-là. Qu’est-ce qu’il y a dans cette entente-là? Pourquoi est-ce que l’on a accepté chez autres syndicats? On va parler avec Dany Richard, qui est président de l’Association canadienne des agents financiers, qui est un bien-entendu de ces syndicats de fonctionnaires. Il est en studio avec nous, bonjour M. Richard.

Dany Richard : Bonjour.

PM : Qu’est-ce qu’on a obtenu d’abord ? Qu’est-ce qu’il y a dans cette entente-là ? Je pense qu’il faut partir de là.

DR : C’est une bonne question. Je pense qu’il faut démystifier, parce qu’il y a une mauvaise compréhension de l’offre qui est sur la table présentement. D’abord et avant tout, il faut comprendre que chaque dollar qui est dû à nos membres leur sera remis. Le salaire qui a été gagné, ils vont le recevoir. Ça va peut-être prendre du temps, parce que Phénix évidemment n’est pas encore réglé et ça va persister, mais leurs dollars, leur salaire est gagné et ils vont le recevoir.

PM : On n’est pas en train de régler ça, ça va se faire au cas par cas et ils vont être payés.

DR : Exactement. En supplément de ça, donc pour dommages et intérêts, l’employeur offre trois paliers de dédommagements. Le premier s’applique à chacun de nos membres et ça, peu importe s’ils ont été affectés par Phénix ou non, et sera une compensation, une indemnité unique, allant jusqu’à cinq journées de vacances supplémentaires. Donc ça, c’est le premier palier qui s’applique à tout le monde.

Mais pour ceux qui ont été touché de façon plus grave—par exemple, si quelqu’un a dû emprunter une marge de crédit ou un prêt personnel, ou même sur leur carte de crédit où ils ont dû verser des intérêts—eux auraient accès au palier numéro deux. S’ils ont des intérêts qui sont démontrables par des reçus, ils seront remboursés. Donc au palier deux, c’est couvert.

Mais ceux qui sont les cas les plus graves, les cas les plus sévères, eux ont accès au palier trois. Je vous donne un exemple : ceux qui ont dû encaisser 50 000 $ de REER parce qu’ils n’ont pas été payé pendant des mois, ça ce sont des cas graves.  Ça ce sont les cas les plus sévères qu’on a vu, et eux ont besoin d’accès à des mesures supplémentaires pour les dédommager en plus pour ce qui s’est passé. Ça c’est le troisième palier, qui sera du cas par cas.

PM : Et donc, essentiellement, ça sur quoi qu’on s’est entendu parce que le deuxième et troisième paliers, on va être au cas par cas, les gens vont devoir démontrer qu’ils ont effectivement subi des pertes, mais on va les compenser pour leurs pertes. Ça sur quoi on s’est entendu qui est nouveau, c’est une compensation pour un peu tout le monde, parce qu’un peu tout le monde été aux prises de cette affaire-là.

DR : Moi ce que j’appelle le palier numéro un, c’est « la clause frustration. » Pour les gens qui ont dit, « moi, je ne savais pas si je vais être payé ou non, » ils ont des erreurs sur leur paie, ce n’est pas tout le monde qui a été touché au même niveau. Moi, je peux vous dire que parmi les 5 000 membres que nous avons, pour les agents financiers, il y en a environ 4 000 qui ont été touchés. Mais pas aux mêmes niveaux. Moi mes membres qui n’étaient pas certains, parce que la majorité de mes membres voulaient accepter l’offre, c’est parce qu’il y a une mauvaise compréhension, qu’ils ont dit, « moi, Dany, écoute, l’argent qui m’est dû, je le veux, cinq jours de vacances ce n’est pas assez. » Ce qui est d’une mauvaise compréhension, l’argent qui vous êtes dû, vous allez le recevoir.

PM : Ces cinq jours de vacances, c’est un plus.

DR : C’est un plus, c’est un boni de frustration et les deux autres paliers vont dédommager pour ce qui était excessif, parce qu’on ne se le cachera pas : Phénix, ça fait quatre ans que c’est là et que ça va continuer encore pendant des années, et nos membres ont été touchés. Il faut reconnaitre ça, il ne faut pas juste dire, « bon, écoute, t’a cinq jours, voilà, tu vas être content avec ça », ce n’est pas le cas. Ce n’est pas du tout le cas. Il y a d’autres mesures, un processus qui a été mis en place pour s’assurer que nos membres qui sont touchés aient des mesures qui vont les compenser.

PM : Mais dans ce contexte-là, pourquoi est-ce que le plus important en termes de nombre de membres, encore une fois le plus important des syndicats de la fonction publique, l’Alliance, décide que c’est nettement insuffisant cette entente-là?

DR : C’est une bonne question. Il faudrait leur demander—

PM : Mais, il faudrait leur en parler, et je comprends, mais pour vous ça ne vous inquiète pas, ça?

DR : Ce que je peux vous dire, c’est que nous on représente—il y a 18 syndicats à la fonction publique fédérale—on représente des membres différents, des différentes démographies, des occupations, des conditions de travail différentes. Nous, pour nos membres, on sait que c’est une bonne offre qui est sur la table, de bonne foi de l’employeur, et pour 12 autres, en fait 13 autres syndicats depuis ce matin, qui ont accepté, puis il y a d’autres syndicats qui sont en processus d’approbation, pour eux ont jugé que l’offre était raisonnable et qu’ils sont en mesure de l’accepter. Pour l’Alliance, je ne peux pas en parler en leur nom, il faut vraiment vérifier avec eux pour quelles raisons ils jugent que l’offre est inacceptable.

PM : Mais, encore une fois, là on parle au bout du processus, il y a 18 syndicats dans la fonction publique et qu’il y en a 17 qui pourraient potentiellement accepter cette offre-là, et un, celui qui a le plus de membres qui la refuse, c’est bizarre qu’on ne réussisse pas à un front commun là-dedans.

DR : Ça fait deux ans qu’on négocie cette offre-là. Ça a pris vraiment deux ans pour venir à une entente qui pour nous est raisonnable. Ce que je peux vous dire est que l’Alliance de la fonction publique faisait partie du sous-comité qui est en discussion pour trouver une entente de règlement, mais quelques jours avant que ça se règle, ils se sont désistés du comité pour dire, « nous on ne continue pas » où est-ce qu’il y a quand-même du travail qui a été fait. Donc, encore une fois, je ne peux pas vous donner les raisons pour laquelle l’Alliance a décidé de ne pas accepter, mais il faudrait vraiment poser la question à eux.

PM : Vous n’avez pas l’impression que vous abandonnez une bataille qui doit être faite au-delà de la compensation? Est-il suffisant d’obtenir une reconnaissance de la part du gouvernement qu’il y a quelque chose d’inacceptable qui a eu lieu ?

DR : Vous avez absolument raison parce que Phénix, c’était un fiasco depuis le début, et ça continue. Donc nous, ce qu’on vient d’entendre, de régler, ce sont les dernières années pour dire « là on a un mécanisme pour ce que s’est passé dans les dernières années », mais ça va continuer, et on va continuer la bataille. Donc là, on est encore sur les comités pour s’assurer que Phénix sera réparé et qu’il y aura un autre système qui sera mis en place pour payer les employés de façon acceptable parce que la situation est quand-même inacceptable. Il faut absolument trouver quelque chose pour régler le problème. Ça c’est un geste de bonne foi de l’employeur pour reconnaitre un « good will » comme on dit en anglais pour dire, « écoutez, je ne peux pas régler le problème de paie tout de suite, mais je veux vous offrir quelque chose en reconnaissance que vous n’avez rien fait de mal les employés, et on veut vous démontrer un gestion de bonne foi pour dire voici ce qu’on vous offre, et on peut le vous donner tout de suite. » Parce qu’au début, ça a pris deux ans à négocier, on disait peut-être qu’on peut vous offrir des intérêts, mais comment on va calculer les intérêts parce que la paie est tout croche, comment on va verser ça ? Parce que si on commence à mettre plus de paiements dans Phénix, ça va encore alourdir ce système, alors que des journées de vacances, c’était quelque chose qui ne passera pas par Phénix, ce qui sera facile—l’entente prévoit 150 jours pour remettre ces jours de vacances là à nos membres. Donc, ça ne va pas alourdir le système et nos membres vont pouvoir en bénéficier quand-même cette année.

PM : Dany Richard est le président de l’Association canadienne des agents financiers, merci beaucoup d’être en studio.

DR : Merci beaucoup, au revoir.